05/12/2025
On ne naît pas fort.
On naît tendre.
Et les empathes… eux, naissent presque transparents.
Des enfants qui sentent avant de comprendre,
qui devinent avant qu’on leur dise,
qui absorbent sans qu’on leur demande.
Moi aussi, j’ai commencé comme ça.
Avec un cœur grand ouvert,
comme une maison dont on aurait oublié de fermer les portes.
Tout le monde pouvait entrer…
et tout le monde entrait.
J’aimais sans limites.
Je donnais sans compter.
Je m’adaptais, encore et encore, pensant que c’était ça, être une bonne personne :
être douce, disponible, silencieuse,
ne jamais déranger.
Je croyais qu’aimer, c’était s’oublier un peu.
Alors je m’oubliais beaucoup.
Et c’est à ce moment-là que certaines personnes apparaissent.
Celles qui repèrent la faille.
Celles qui prennent sans jamais rendre.
Celles qui te vident doucement en te faisant croire que tu es trop sensible, trop intense, trop tout.
Les empathes naïfs sont des festins pour les affamés du cœur.
Et moi… j’ai été servie sur un plateau.
Le cycle était toujours le même :
on profitait de ma gentillesse,
on manipulait ma patience,
on mettait en doute ce que je ressentais,
jusqu’à me faire croire que j’étais le problème.
Et un jour, comme pour tous les empathes, il y a eu ce moment.
Ce point de rupture.
Cette trahison qui ne s’efface pas,
celle qui ne se digère pas,
celle qui t’arrache un morceau de toi.
Je me suis effondrée.
Pas un petit effondrement contrôlé —
non.
Un effondrement qui éclate le cœur en mille morceaux,
qui renverse toutes les croyances,
qui t’oblige à regarder, enfin, ce que tu n’as jamais voulu voir.
Mais c’est souvent là, dans les décombres,
que quelque chose se met à bouger.
Une lumière, timide d’abord, mais tenace.
La force éveillée.
J’ai compris que l’amour ne devait plus me coûter ma paix.
Que la compassion ne justifiait pas l’autodestruction.
Que ma douceur n’avait pas à être un piège.
Alors j’ai commencé à me reconstruire.
Lentement.
Intimement.
Une limite après l’autre.
Un « non » après un autre.
Une respiration qui disait : je me choisis.
J’ai appris à reconnaître ce qui sonne faux.
À sentir les relations bancales avant qu’elles m’usent.
À aimer toujours — mais jamais au prix de ma dignité.
À donner — mais jamais plus que ce que je peux perdre sans me trahir.
Et c’est là que l’empathie change de forme.
Elle devient un choix, plus une condition.
Un don maîtrisé, pas un torrent incontrôlable.
Je ne suis plus naïve.
Mais je ne suis pas devenue froide.
Je suis devenue consciente.
Un empathe autonome.
Bienveillant, profond, sensible —
mais inexplorable.
Ma lumière n’est plus un phare ouvert à tous vents.
C’est une flamme que je protège,
que je dirige,
que j’offre à ceux qui savent en prendre soin.
La naïveté m’a appris à aimer.
La blessure m’a appris à me respecter.
La renaissance m’a appris à me choisir.
Et maintenant…
non, je ne suis plus une proie.
Je suis un être entier.
Aligné.
Présent.
Puissant.
Et infiniment humain.