18/10/2022
Un cas clinique pour les externes et internes.
Un enfant âgé de 12ans, sans antécédents pathologiques personnels. Consulte pour une toux productive muqueuse et une obstruction nasale depuis plusieurs mois avec une exacerbation de ces symptômes depuis une vingtaine de jours sans amélioration malgré 2 cures d'antibiotiques (Azithromycine puis Amoxicilline).
L'examen clinique retrouve un patient calme eupneique au repos. Murmure vésiculaire bien perçu aux 2 champs pulmonaires avec des râles sibilants en fin d'expiration à l'auscultation. La radiographie thoracique de face retrouve des signes de distension thoracique. La spirométrie montre un trouble ventilatoire obstructif totalement réversible.
Discussion :
Le tableau clinique, radiologique et fonctionnel évoque un asthme bronchique associé à une rhinite allergique. Un interrogatoire plus poussé retrouve la nation d'asthme bronchique chez les cousins du patient et de rhinite allergique chez sa maman.
La rhinite allergique est évoquée devant la présence des éternuements, d'un prurit nasal, d'une obstruction nasale avec une anosmie. Ces symptômes sont persistants car durent plus de 4 semaines. Modérés à sévères car retentissent sur l'activité quotidienne de l'enfant. L'histoire clinique est en faveur d'une sensibilisation aux acariens, aux poils de chats ou au pollen d'oliviers mais les tests cutanés allergologiques permettront de renforcer le diagnostic de l'allergène en cause.
L'asthme bronchique est évoqué devant la toux chronique ainsi que les râles sibilants perçus à l'auscultation qui témoignent de l'obstruction bronchique. Une radiographie thoracique est obligatoire lors de la première consultation afin d'éliminer des diagnostics différentiels pouvant également être à l'origine d'une obstruction bronchique (corps étranger, tumeur carcinoïde, bronchiectasies...). La radiographie thoracique chez notre patient retrouve des signes de distension thoracique (thorax quadrangulaire, élargissement des espaces inter-costaux, horizontalisation des côtes, aplatissement des hemi-coupoles diaphragmatiques et hyperclarté parenchymateuse) qui augmente la probabilité de l'asthme bronchique (distension par piégeage aerique secondaire à l'obstruction bronchique).
La spirométrie est l'examen qui permet de confirmer l'obstruction bronchique. Elle retrouve à l'état de base un trouble ventilatoire obstructif :
- Courbe débit-volume légèrement concave.
- Baisse des débits et des volumes (valeurs inférieures à la LIN ou à 80%) : CVF à 79% - VEMS à 73% et indice de Tiffeneau (VEMS/CVF) à 78%.
Le test de réversibilité aux bronchodilatateurs montre une réversibilité totale :
- Gain du VEMS de 20% et de 360ml (gain supérieur à 12% et à 200ml).
- Normalisation de l'indice de Tiffeneau (VEMS/CVFpost à 82%).
Il s'agit donc d'un trouble ventilatoire obstructif totalement réversible léger (VEMSpost >80%).
La normalisation de la CVF après test de réversibilité aux bronchodilatateurs (gain de 14,7%) confirme la distension thoracique dynamique secondaire à l'obstruction bronchique.
Au total, le patient présente un asthme bronchique associé à une rhinite allergique persistante modérée à sévère.
Concernant la rhinite allergique, l'éviction allergénique constitue le premier élément de la prise en charge. L'éducation thérapeutique du patient et de ses parents contribue à une meilleure adhérence au traitement. Je laisse à votre disposition une vidéo explicative destinée au grand public sur les allergies respiratoires et les différentes mesures d'éviction.
Les anti-histaminiques de 2eme génération par voie orale sont le traitement de première intention de la rhinite allergique. La plupart de ces anti-histaminiques sont autorisés chez l'enfant de plus de 12ans. La Desloratadine en sirop est recommandée chez les enfants plus jeunes. Les anti-histaminiques par voie nasale (Azelastine) peuvent être également efficaces. Les corticoïdes par voie nasale sont également indiqués car les symptômes sont modérés à sévères.
Quant à l'instauration du traitement de l'asthme bronchique, nous sommes devant un enfant de 12ans qui a des symptômes quotidiens avec une exacerbation récente et une limitation des débits aériens à l'EFR. Il est donc recommandé de commencer un traitement de fond à base d'association ICS moyenne dose-LABA ou ICS seuls forte dose. Les LABA (b2-agonistes d'action prolongée) sont également autorisés à partir de 12ans mais pour des soucis de sécurité sociale nous pouvons débuter par des ICS forte dose (exemple Budesonide 800ug/j) et réajuster le traitement en fonction du contrôle des symptômes.
Là encore, l'éducation thérapeutique constitue un processus intégré aux soins du patient asthmatique, elle doit permettre :
- L'identification des facteurs déclenchant et leur éviction : tabagisme passif, pneumallergènes, allergènes alimentaires, froid, effort brutal...
- La connaissance des signes de gravité d'une crise d'asthme.
- La prise en charge de la crise d'asthme selon un plan d'action écrit personnalisé : b2-agonistes d'action courte, augmentation du traitement de fond, corticothérapie orale...
- La compréhension des modalités du traitement de fond et du traitement de secours.
- La maîtrise des techniques d'inhalation.
Lien de la vidéo sur les allergies respiratoires :
https://fb.watch/hEckSjHmDW/