02/04/2021
Comme promis, je vous partage un des contes : L'histoire de l'attrapeur de nuages ! Merci à "La Vie est en papier" pour la superbe illustration !(https://www.facebook.com/LaVieEstEnPapier)
Nao est un petit bonhomme qui habite sur une planète bien lointaine. Cette planète est assez similaire à la nôtre, parsemée d'océans, de forêts et de merveilles, avec toutefois quelques différences : elle est plus petite et la gravité est bien moindre.
Nao habite dans un petit village appelé Issy. A l’ouest, précisément à quelques kilomètres, se trouve le lieu-dit du Pas de Cé et à l’est la grande ville de Toumaurot, la ville des possibles.
Nao est collectionneur de nuages, c'est-à-dire qu’il passe le plus clair de son temps, avec son grand filet, à attraper les nuages qui passent au-dessus de lui. A quoi cela lui sert-il ? A rien ! Qu’en fait-il ? Rien. Alors pourquoi fait-il ça ? Il ne le sait pas mais c’est plus fort que lui, une part de lui est convaincue que chaque nuage est très important et qu’il doit l’attraper pour le suivre, impossible d’y résister. Bien que cela lui paraisse naturel, cette activité ne le remplit pas de bonheur, il se sent en permanence inquiet, anxieux, préoccupé.
Les habitants du village le connaissent et savent que c’est difficile de passer du temps avec Nao, il n’est que très rarement présent ici. C’est simple, pour le trouver, il faut lever le nez au ciel et regarder, à l’est ou à l’ouest. Nao est très occupé, mais il se persuade que son travail est essentiel. Pour l’instant, cela lui suffit pour lui faire oublier qu’il passe le plus clair de son temps seul, dans les nuages.
Jusqu’à ce jour ce fameux jour. Le vent souffle très fort vers l’ouest, Nao tient dans son filet un fantastique nuage épais et gris. Bien décidé à ne pas le lâcher, le voilà poussé à l’est avec son nuage à quelques kilomètres, au Pas de Cé. Pendant que le vent le transporte, Nao observe attentivement sa prise. Avez-vous remarqué comme notre esprit est capable de reconnaître des visages n’importe où ? Dans un nuage, sur la lune, sur un tronc d’arbre… C’est exactement ce qui se passe pour Nao à cet instant. Dans ce nuage, il croit reconnaître le visage de son ami d’enfance ! “Incroyable” se dit-il “le temps est passé tellement vite, je ne l’ai pas vu depuis si longtemps, comment va-t-il ? ”. S’apercevant qu’il était déjà au-dessus du lieu-dit du Pas de cé, il se décroche et se laisse retomber sur la terre ferme.
Un peu abasourdi de réaliser le temps passé, en marchant pour revenir à Issy, il prend tout à coup conscience, sur le chemin, de tous les changements qui ont eu lieu. Il était tant occupé à vadrouiller entre le Pas de Cé et Toumaurot, suspendu aux nuées. Il comprend tous les instants qu’il a ratés dans son village, avec sa famille de cœur, ses amis… Et alors, une brusque angoisse s'infiltre dans tout son corps. Cette émotion est paralysante et l’empêche de poursuivre son chemin, il erre.
Au bout de quelques jours, ses amis s’inquiètent de ne plus le voir parcourir le ciel d’est en ouest, ou d’ouest en est comme à son habitude. Ils commencent, munis de clochettes, à parcourir les alentours. Et c’est justement ce tintement qui vient sortir Nao de sa torpeur et le guide jusqu’Issy où ses amis l’accueillent chaleureusement. Avec un regard neuf, Nao prend plaisir à observer le village, les habitations, la végétation, à serrer dans ses bras ses amis. Il ouvre grand ses oreilles pour écouter tous les sons environnants. Il redécouvre la sensation de se sentir debout, ancré sur le sol. Et il comprend que c’est ici et maintenant que la vie se déroule et s’offre à lui. Comme un présent, il savoure l’instant et sa présence se fait, jour après jour, plus vive. Alors que les nuages continuent de filer dans le ciel d’est en ouest et inversement, il apprend à les contempler et à simplement les laisser passer car, il le comprend aujourd’hui, seul l’instant, ici et maintenant, compte.
Il se surprend encore parfois à agripper son filet et à sauter pour attraper un cumulus qui lui semble si particulier. Pour ne plus se laisser happer par leur incessant va et vient, il accroche une petite clochette dorée à son filet. Si bien qu’à chaque fois qu’il se surprend à s’accrocher, le doux tintillement de la clochette vient lui rappeler l’importance de la présence ! Et il apprend ainsi, jour après jour, à s’arrêter pour profiter de la magie de l’instant. Simplement contempler, respirer, ressentir et oser laisser passer les nuages dans le ciel.