22/11/2025
Ce vendredi soir, au Rox de Rouvroy, Olivier Hamant nous a offert un voyage intellectuel puissant : une remise en question en profondeur de notre obsession collective pour la performance, et une invitation urgente à explorer une autre voie — celle de la robustesse, qu’il appelle « la troisième voie du vivant ».
En s’appuyant sur des décennies de recherche en biologie, il rappelle que nous avons souvent mal interprété Darwin : dans la nature, ce ne sont pas les plus performants qui survivent, mais les plus adaptables, ceux qui disposent de marge de manœuvre. Le vivant prospère grâce à ce que nous considérons, nous humains, comme des « défauts » :
👉 le hasard,
👉 la redondance,
👉 l’hétérogénéité,
👉 l’erreur,
👉 la lenteur,
👉 l’imprécision et l’inachèvement.
Autant d’éléments qui constituent le cœur de la robustesse.
Il nous a ensuite montré comment notre civilisation s’est progressivement enfermée dans le culte de la performance : optimisation permanente, recherche du moindre coût, obsession de la précision et du rendement… Un modèle adapté à un monde stable et abondant, mais qui devient dangereux lorsqu’on bascule — comme aujourd’hui — dans un monde fluctuant et turbulent, marqué par les pénuries, les extrêmes climatiques, la perte de biodiversité et les pollutions globales.
Selon lui, cet excès de performance alimente directement l’Anthropocène :
➡️ on performe,
➡️ on dépasse les limites planétaires,
➡️ on déclenche des boucles de rétroactions,
➡️ et on fragilise nos sociétés.
Olivier Hamant a également rappelé les faiblesses structurelles de la performance :
Le cygne noir : un petit aléa suffit à tout faire basculer, comme on l’a vu lors du Covid.
L’effet rebond : les gains d’efficacité sont immédiatement annulés par une surconsommation.
La loi de Goodhart : transformer un indicateur en objectif le rend absurde.
Face à cela, il ne s’agit pas de renoncer à la performance, mais de trouver un équilibre : un monde robuste capable d’activer la performance quand c’est pertinent — pas l’inverse.
La robustesse devient alors un véritable projet de société :
🌱 réhabiliter la coopération plutôt que la compétition,
🌱 passer d’un « infini matériel » à un infini des interactions,
🌱 utiliser la systémique pour mieux comprendre les trajectoires possibles,
🌱 développer des circularités « non performantes » qui préservent la matière avant le temps,
🌱 imaginer des récits qui rendent désirable un futur moins optimisé mais plus vivable.
Dans un contexte géopolitique et économique où la performance est brandie comme unique horizon, sa voix sonne comme un appel à changer de cap — lucidement, mais avec optimisme. Car oui, des démarches robustes émergent déjà dans l’éducation, dans les entreprises, dans les territoires, dans les communs.
Une soirée dense, éclairante et profondément stimulante.
Merci à Olivier Hamant pour cette boussole précieuse, et à Raphael Goblet d'avoir préparé et animer la rencontre.