30/11/2025
Merci pour ce texte magnifique avant les fêtes 🎄
𝗣𝗼𝘂𝗿𝗾𝘂𝗼𝗶 𝗻𝗼𝘂𝘀 𝗰𝗲́𝗹𝗲́𝗯𝗿𝗼𝗻𝘀 𝗡𝗼𝗲̈𝗹.
Chères Amies et Amis de Pairi Daiza,
Nous avons tous, quelque part en nous, un souvenir de Noël.
Une lumière dans la nuit, une table partagée, un parfum d’enfance.
Ce n’est pas seulement une fête : c’est un lien.
On voudrait à présent remplacer Noël par vacances d’hiver.
Mais l’hiver n’est pas une fête : c’est une saison.
Noël, lui, est un élan.
Depuis quelque temps, les mots changent.
On gomme les prénoms, on efface les racines, on polit le langage jusqu’à en faire un miroir sans reflet.
Mais ces mots sans mémoire n’évoquent ni l’espérance, ni la chaleur, ni la joie partagée.
Il ne reste alors que deux semaines de congé, sans âme ni chant.
Et peu à peu, sous prétexte de neutralité, on fait disparaître ce qui faisait battre le cœur des saisons : leurs symboles, leurs chants, leurs mots.
Et à force de vouloir tout aplanir, on finit par n’inclure que le vide.
Car une inclusion sans mémoire n’accueille plus personne : elle efface tout.
Et parfois, on va plus loin encore.
On pense rassembler en éliminant ce qui fait notre humanité.
On remplace les visages par des formes lisses, indistinctes, censées représenter tout le monde et qui, en réalité, ne ressemblent à personne.
Mais partout sur la planète - dans les villages du Sahel, les mégapoles d’Asie ou d’Amérique du Nord, les montagnes d’Amérique latine, les campagnes d’Europe, les archipels du Pacifique - ce sont les visages qui nous relient.
Un visage porte une histoire, la dignité, la lumière.
Effacer les visages pour ne blesser personne, c’est oublier que ce sont justement eux qui guérissent les blessures : le regard d’un enfant, le sourire d’une mère, la bienveillance d’un inconnu.
Les cultures diffèrent, les langues diffèrent.
Mais le visage est universel : la première langue de l’humanité, la première preuve de présence, la première étincelle de paix.
Une société peut vivre sans croyance, mais pas sans ferveur.
Quand tout devient tiède, le monde perd sa musique.
Noël, c’est aussi la tendresse de nos origines.
Le sapin de notre enfance, ses boules fragiles, son odeur de forêt, les reflets des guirlandes sur les vitres givrées.
Ce n’était pas la richesse, c’était la promesse d’un instant où tout le monde, pour un soir, se tenait un peu plus près.
Et au centre de cette fête, il y a une crèche.
Pas un symbole de puissance, mais de pauvreté.
Une étable sans confort, le souffle des bêtes pour chaleur, un peu de paille pour berceau.
Une femme épuisée, un homme inquiet et dans leurs bras, un enfant fragile.
Rien de plus simple, rien de plus vrai.
Le message de Noël est peut-être là : la lumière peut naître dans le froid, et il suffit d’un cœur ouvert pour que la nuit s’illumine.
Ensemble, dans notre Jardin, nous célébrerons Noël.
Parce que cette fête parle d’amour, de naissance, de lumière.
Parce qu’elle honore la vie qui résiste au froid.
Parce qu’un monde qui a peur de ses propres mots finit par perdre son âme.
Notre Jardin accueillera aussi, dans quelques années, les traditions du Proche-Orient, berceau des trois grandes religions du Livre et des civilisations qui les ont précédées.
Là aussi, nous célébrerons ce qui unit : la foi en la vie, la tendresse, la lumière partagée.
Et nous célébrerons la beauté des autres fêtes, dès qu’elles portent le même message : celui de la paix, de la bienveillance, du partage.
Qu’il s’agisse de Diwali, de Hanoukka, de l’Aïd al-Fitr ou du Nouvel An lunaire, toutes célèbrent la même victoire : la lumière intérieure qui résiste à la nuit.
La beauté du monde, c’est aussi sa diversité, pas son effacement.
Les croyances, lorsqu’elles sont habitées par l’amour, éclairent plus qu’elles ne séparent.
Elles rappellent que la lumière ne nous appartient pas : elle se partage.
Dans le regard d’un enfant, d’un animal, d’un inconnu, elle prend mille formes, toutes sacrées.
Partout, la lumière revient.
Noël en est un nom, mais elle en a mille.
C’est la flamme que les hommes, depuis la nuit des temps, protègent contre le vent : la vie plus forte que la peur.
Alors oui, dans notre Jardin, il y aura des sapins, des lampes et des chants de Noël.
Non pour imposer une foi, mais pour préserver ce qui réchauffe et rassemble.
Noël n’est pas un héritage à cacher.
C’est une promesse : garder la lumière vivante, même quand elle vacille.
Et si nous la gardons ensemble, elle ne s’éteindra jamais.
Éric Domb