22/10/2025
PLAIDOYER DE MAÎTRE RENAUD. AVOCAT DE LA DÉFENSE DE PRESLEY.
Monsieur le Président,
Monsieur le Procureur,
Mesdames et Messieurs les membres du jury,
Aujourd’hui, je prends la parole non pour défendre un monstre, non pour justifier l’injustifiable, mais pour redonner une voix à un jeune homme que la douleur, la peur et la fatalité ont condamné avant même que la justice ne se prononce.
Je vous demande, le cœur sincère, de ne pas seulement écouter un dossier, mais d’écouter une histoire humaine.
Une histoire tragique, certes, mais une histoire d’amour, d’innocence, de naïveté et de malchance.
Ce jeune homme que vous voyez là, tête baissée, mains tremblantes, c’est Tinaus Presley.
Un jeune homme de vingt-quatre ans, sans antécédents, sans violence, sans passé trouble.
Un jeune homme que la vie n’a pas toujours épargné, mais qui a toujours choisi la voie droite, la voie simple.
Il n’est pas ici parce qu’il a voulu tuer.
Il est ici parce qu’il a aimé.
Et dans ce monde où aimer devrait être une bénédiction, l’amour s’est transformé pour lui en malédiction.
Monsieur le Président,
je n’essaierai pas de peindre un ange.
Oui, Tinaus a commis une erreur.
Il a invité chez lui une jeune fille, sans prévenir ses parents, sans se douter que ce geste banal, ce week-end d’amour et de complicité, allait devenir le drame de sa vie.
Ce n’était ni un piège, ni une préméditation.
Ce n’était qu’un élan du cœur, un instant d’insouciance comme tant de jeunes en vivent chaque jour.
Mais ce jour-là, le destin a frappé.
Et c’est lui, Tinaus Presley, qui en paie aujourd’hui le prix.
La question que je pose à la Cour est simple :
Où est la preuve du meurtre ?
Où est la trace de violence ?
Où est le témoin d’une dispute, d’une bagarre, d’un geste fatal ?
Aucune.
Rien.
Absolument rien dans le dossier ne démontre que cette jeune fille ait été tuée par lui.
Les rapports médicaux parlent d’un malaise.
D’un corps retrouvé sans signes d’agression, sans plaie, sans hémorragie.
Mais parce qu’elle est morte chez lui, parce qu’ils étaient seuls, on a voulu une explication immédiate.
Et dans la panique, on a trouvé le coupable le plus facile : le garçon.
Monsieur le Procureur,
vous représentez la loi.
Mais la loi, avant d’être une arme, doit être une lumière.
Et cette lumière, aujourd’hui, doit éclairer la vérité, pas nourrir la peur.
La société a jugé Tinaus avant vous.
Les rumeurs l’ont crucifié avant que la justice ne parle.
Et depuis, il vit avec une étiquette qu’il ne mérite pas : “meurtrier”.
Mais regardez-le.
Écoutez-le.
Cet homme n’a pas la haine dans le regard, il a la douleur.
Il ne revendique pas la vengeance, il implore la compréhension.
Ce qu’il a dit tout à l’heure, il ne l’a pas lu dans un papier.
Il ne l’a pas appris par cœur.
C’était sa vérité nue, brute, tremblante.
Les mots d’un homme qui a tout perdu en un instant.
Il n’a pas cherché à fuir, ni à mentir, ni à maquiller la réalité.
Il a appelé à l’aide.
Il a collaboré avec la police.
Il a tout raconté, chaque minute, chaque geste, chaque mot échangé.
Est-ce là le comportement d’un coupable ?
D’un homme qui a voulu dissimuler un crime ?
Non.
C’est le réflexe d’un cœur sincère, d’un être accablé par l’incompréhension.
Mesdames et Messieurs du jury,
je ne vous demande pas la pitié.
Je vous demande la justice dans son humanité.
Tinaus n’est pas un danger pour la société.
C’est un jeune homme qui a besoin d’aide, de reconstruction, de pardon.
Ce drame a brisé deux familles.
La famille de la victime, qui pleure une fille partie trop tôt.
Et la famille de Tinaus, qui pleure un fils vivant, mais enfermé dans un tombeau de regrets.
Personne ici ne sortira vainqueur de ce procès.
Mais vous, vous pouvez empêcher que la douleur d’un accident se transforme en injustice éternelle.
Rappelez-vous ceci :
Un meurtrier tue une fois.
Mais un innocent accusé à tort meurt chaque jour de l’intérieur.
Et cela, Monsieur le Président,
c’est une peine bien plus lourde que toutes celles que nos codes peuvent prévoir.
Je vous en supplie,
au nom de la vérité, au nom de la justice, au nom de l’humanité même,
ne laissez pas un cœur sincère être enterré vivant dans le mensonge.
Ne laissez pas un jeune homme expier une faute qu’il n’a pas commise, simplement parce que le destin a mal tourné.
Il a déjà tout perdu :
la femme qu’il aimait, la confiance de sa communauté, son avenir.
Le condamner, ce serait achever ce que le sort a déjà détruit.
Je demande donc à la Cour,
avec tout le respect que m’impose cette robe,
de regarder au-delà du soupçon, au-delà du malentendu, au-delà de la douleur.
Je demande qu’on voie, derrière ce visage fatigué, l’innocence d’un cœur pur.
Qu’on entende non le bruit des accusations, mais la voix du silence qui crie sa vérité depuis trop longtemps.
Tinaus Presley n’est pas un meurtrier.
C’est un jeune homme victime d’un drame, d’un hasard tragique, et d’un monde trop prompt à juger.
Monsieur le Président, ça pouvait être votre enfant à la place de Presley.
Ça pouvait être moi aussi mon enfant et ça pouvait être aussi l'enfant de chacun de nous ici présent.
Rendez-lui ce que la vie lui a arraché :
la dignité, la vérité, la paix.
Et qu’en prononçant votre verdict,
vous puissiez regarder vos consciences en disant :
« Aujourd’hui, nous n’avons pas condamné un homme, nous avons sauvé une âme. »
Je vous remercie.