12/13/2025
Diz ans déjà que tu nous a quitté ce soir de décembre 2015. Tu as eu la délicatesse (je suis certaine que ton coeur le savait) de partir un soir où nos filles étaient à mes côtés. Mais cette délicatesse a anéanti notre monde d’un claquement de doigts, sans crier gare.
Dieu sait que je t’en ai voulu — tant voulu — de partir en me laissant la pleine responsabilité d’élever nos deux filles. Est-ce que je t’ai pardonné ? Pas complètement, je dois te l’avouer… et me l’avouer.
Il y a une colère persistante en moi, nourrie d’injustice, de sentiments d’abandon, de trahison même.
Au fond de moi, derrière cette colère, se cache une grande culpabilité de t’avoir quitté deux ans plus tôt, comme si une infime partie de moi assumait t’avoir tué à petit feu.
Quand monte cette émotion douloureuse, ma mémoire ouvre un petit tiroir à souvenirs. Ce moment où, au milieu de mes larmes, ma psy m’avait chuchoté, d’une voix baignée de compassion : « Et si ton amour lui avait permis de vivre plus longtemps que s’il ne t’avait jamais rencontrée ? ».
Ce qu’il me reste de toi aujourd’hui, dans ce monde sans toi, ce sont nos filles. Et ça, c’est ce que nous avons accompli de meilleur ensemble. C’est l’œuvre de notre amour. Et qu’il était fort, cet amour… n’est-ce pas ?
Ce soir, j’ai allumé deux bougies pour toi : une pour notre vie ensemble,
et une pour notre vie depuis ton départ. Ces quelques fois où tu es venu me voir, me parler…
Chez l’ostéo, tu te souviens ? Tu m’avais pris la main comme seul toi savais le faire. Puis à la maison, lors de cette soirée d’été avec les filles, où tu as manifesté ta présence d’une façon que je n’oublierai jamais. Et il y a quelques jours, tu es venu dans mes rêves. Tu ne disais rien. Tu étais juste là, à me regarder, à m’écouter. Tu ne l’avais encore jamais fait ainsi.
Ce soir, quand j’ai reçu le message de mon frère nous disant qu’il pensait fort à nous trois, j’ai eu un temps d’arrêt.
Et là, j’ai réalisé quelle date nous étions. Était-ce cela, ma tristesse du jour ? Mon corps et mon âme savaient. Ma tête, elle, a voulu oublier.
Et je me suis aussitôt dit : « je ne peux pas me permettre de vivre à moitié ».
Je dois prendre soin de moi davantage, pour profiter de la vie, dans ce corps qui me porte et me soutient chaque jour. « Pas de temps à perdre / PTP. »pas vrai ?
Je me souviens du jour où j’avais vu ces trois lettres majuscules sur ton mollet, tatouées en noir sur fond rouge — tes deux couleurs préférées. Sur le coup, je n’en avais pas saisi le sens.
Là, ça me frappe. Merci pour le rappel.
Dans deux semaines, j’aurai 47 ans.
Six ans de plus que toi dans cette vie.
Je m’engage à la vivre du mieux qu’il me sera possible, en pensant au privilège immense que j’ai d’être là, les deux pieds sur terre.
Mon défi est de rester bien ancrée, de cultiver la joie, de ne pas avoir peur de l’avenir, de profiter du moment présent et de trouver ma place, mon Ikijai.
En écrivant ces mots, je crois que mon Ikijai est de tout faire en mon pouvoir pour être heureuse et en santé.
C’est ma pleine responsabilité.
Car je serai grand-mère Doum, une si jolie Mamie Choupa 🙂
Pour nos filles.
Pour toi aussi.
Mais plus que tout : pour moi !!!
Je vais les voir se réaliser en tant que femmes, avoir des enfants si elles le souhaitent, découvrir le monde. Je vais essuyer leurs larmes, partager des fous rires, les écouter… jusqu’à mes 101 ans. C’est un beau chiffre, tu ne trouves pas ?
Tu te rappelles quand tu m’avais demandé, lors d’une constellation familiale, si je m’aimais assez pour vivre ? Ma réponse alors, je l’avais susurrée à demi-mot il y a quatre ans. Ce soir, elle est la suivante : en osti, oui!!!
Je t’envoie tout mon amour et ma lumière, où que tu sois. Mais j’ai ben l’impression que tu n’es pas loin.
Marion