20/12/2021
Chères patientes, chers patients,
Il est certain que la crise sanitaire dure et pèse sur tous. Les mesures entreprises pour nous protéger et protéger notre économie sont de moins en moins facilement supportables, le sujet déchire la société et nos familles, nous en avons tous bien conscience.
Nous souhaitons par ce message clarifier notre positionnement sur les vaccins contre le/la Covid-19, mais en aucun cas participer à diviser davantage, bien au contraire: nous souhaitons assumer notre point de vue, vous l’expliquer, mais quel que soit votre choix d’être ou non vacciné, nous resterons vos médecins, à vos côtés. Nous sommes clairement favorables à cette vaccination et à l’heure où ils écrivent ces lignes, vos médecins sont en attente de leur dose « booster ». De nombreuses incertitudes subsistent (faudra-t-il « se vacciner tous les 6 mois » ? ou tout recommencer à zéro en cas de variant résistant ? et bien d’autres questionnements…)
Nous sommes témoins d’une chose: même si vous êtes très largement favorables à la vaccination, vous restez nombreux à ne pas souhaiter être vaccinés. Dans l’immense majorité des cas les discours ne sont pas "violents" ou irrespectueux, mais il s'agit de personnes dont les interrogations sont fondées, qui doivent être écoutées et avec qui nous discutons volontiers. Parfois (mais c’est rare) c’est plus déroutant car la médiatisation des choses (dont une partie est gérée par les réseaux sociaux qui proposent des contenus toujours plus orientés dans le sens de nos « clicks » précédents et mettant donc à mal notre esprit critique…) inverse la relation médecin/patient habituelle: la personne se place en « sachant » et ne vient pas demander notre avis de médecin; ceci aborde d’ailleurs un autre débat que nous ne développerons pas ici: « votre médecin est-il un bien de consommation comme un autre ? »
Néanmoins, alors que la gestion des mesures sanitaires est du ressort de la décision politique et qu’un débat d’opinions peut en découler, il ne nous paraît pas juste de prendre la problématique vaccinale comme un sujet où les opinions peuvent tellement varier en ce qui concerne l’efficacité et la tolérance du vaccin. Le choix d’être ou non vacciné devrait idéalement être respecté, et ceci est ouvert à discussion. Mais la science doit répondre aux questions fondamentales sur l’utilité et la tolérance des vaccins. Le propre de la réflexion scientifique est de rester prudente, et de se remettre en question sans cesse; c’est le consensus scientifique, établi par des milliers de scientifiques, qui doit être écouté en priorité. Les discours d’une poignée de personnes médiatisées à contre-courant, souvent les mêmes d’ailleurs, relèvent ainsi non du consensus établi par la science, mais du domaine de la croyance: on a le droit d’y croire ou non. Cependant en temps de crise cela pose problème car les croyances des uns ne doivent pas menacer la vie des autres.
Pour résumer les choses il nous apparaît absolument indispensable de résumer quelques faits:
1/ les vaccins à ARNm (pas leur technologie de fabrication) sont nouveaux, parce que le coronavirus Covid-19 est nouveau.
2/ le virus étant nouveau, on a beaucoup plus de raisons de craindre des effets à long terme sur notre système immunitaire venant de sa part que des vaccins dont on connaît bien le fonctionnement.
3/ concernant les effets secondaires à court et moyen terme, ils sont plus nombreux qu’avec la plupart des autres vaccins, oui. Notamment du fait de la réaction d’immunisation puissante qu’ils engendrent. Mais les effets graves sont rares et enregistrés à 4 à 5 pour 10.000 personnes (donc même pour une personne de 20 ans inférieurs au risque de forme sévère du Covid).
4/ ce n’est pas parce que plus de de 9 personnes sur 10 ne seront pas beaucoup plus embêtées lors de l’infection que ce virus est bénin. Cette infection est potentiellement gravissime, nous entendons trop souvent la phrase « je suis jeune je n’ai aucun risque » ce qui est loin d’être vrai.
5/ oui les hôpitaux sont (selon les régions, cela varie avec le temps) parfois en surcharge dans les soins intensifs à cause du Covid. Votre voisine qui travaille dans tel hôpital qui vous a raconté que c’est inventé n’est pas fiable. Et sans toutes les mesures adoptées depuis le début de la crise, il n’y a probablement pas une famille dans le pays qui n’aurait pas vécu de près ou de loin un drame par manque de place d’hospitalisation chez l’un de leurs proches.
6/ être vacciné n’empêche pas de transmettre le virus et ne doit en aucun cas faire retomber les mesures de base contre l’expansion du virus. Mais la vaccination limite quand même largement la contagiosité (et probablement même la sévérité des formes chez les contaminés par un vacciné même si ce n’est pas prouvé).
7/ un vaccin efficace à 100% n’existe pas. C’est d’ailleurs pour cela que plus la proportion de vaccinés est importante plus on limite le risque pour ceux dont l’immunisation vaccinale est moins efficace. L’efficacité des 2 doses vaccinales sur le variant Delta a largement diminué (même si cela reste efficace contre les formes sévères), et cela semble se confirmer avec le variant Omicron. Mais n’oublions pas une chose simple: plus un virus trouve des hôtes non immunisés par où passer, plus le risque de nouveau variant majoritaire est important.
8/ suite du point 5/ => les vaccins sont (en dehors des gestes barrières) pour le moment la SEULE arme efficace dont nous disposons. La donne pourrait changer avec l’arrivée d’un traitement efficace en cas d’infection, ce qui semble en bon chemin. Cela permettrait par exemple de laisser la possibilité de vacciner les personnes les plus à risque sans autant risquer de sidérer le système de soins avec les non immunisés.
9/ le concept de liberté individuelle s’arrête à la notion de bien commun et de respect de l’autre, en particulier en temps de crise. Se vacciner, c’est participer à protéger son prochain. C’est ce qui d’ailleurs rend les débats passionnés et passionnants dans nos démocraties. Mais une chose est sûre: le virus n’a que faire de nos débats.
« Les meilleurs choix que l’on fait sont ceux que l’on fait justement quand on n’a plus le choix ».
Nous terminerons par dire que dans la vie, nous n’obtenons pas toujours un choix parfait. La société entière est actuellement cristallisée sur la question vaccinale, c’est à nos sens une erreur. C’est bien de la balance entre le vaccin (risques et avantages) et l’infection (risques et… ?) qu’il s’agit. Et cette balance penche largement en faveur du vaccin.
Pour résumer: tout en restant bien sûr ouverts à la discussion avec nos patients en consultation, nous sommes absolument favorables à la vaccination contre le Covid-19, car nous pensons que c’est dans l’intérêt de nos patients et de nos familles.
Dr Benjamin de La Tour et Dr Sylvain Bouly