22/10/2021
Je suis émue de voir mes collègues se réunir derrière un drapeau
Humble et sombre, il se lève et nous regardons dans la même direction
Sans parti politique ni institution, il porte une même souffrance
Et sonne la réunification
Nos identités, fortes de leurs histoires conceptuelles ne disparaissent pas
Mais l’illusion du clivage se dissipe
Il flotte, vulnérable prêt à être écrasé d’un coup de talon
Mais nous resterons à ses côtés
Pour réclamer le respect de la dignité de nos patients que l’on stigmatise, que l’on trie
« Je n’y ai pas droit » m’a-t-on dit. « Je ne rentre pas dans les critères. »
Une réalité écœurante et insupportable que nous découvrons à leur côté, cherchant dans les médias des informations qui ne nous sont pas offertes. Aucun courrier, aucun mail ne nous a été adressé
Nous réclamons le respect de la dignité de nos collègues les plus précaires, livrés à la tentation d’indemnités qui ne leur permettront pas de toucher le smic et de nos collègues hospitaliers à qui l’on refuse un salaire décent
Nous réclamons le respect de nos collaborateurs médicaux et paramédicaux sur qui l’on fait peser l’effondrement de l’accompagnement psychiatrique et qui sont instrumentalisés vers d’une pseudo-prise en charge en libérale
Nous réclamons le respect de notre dignité
Car notre gouvernement, s’il écrase notre drapeau doit savoir que c’est le dernier réceptacle de la souffrance qu’il méprise
Nous ne briserons pas de vitrines et ne heurterons pas les CRS, car c’est dans nos cabinets qu’ils viennent dire leurs angoisses et le souffle qui leur manque
Nous ne malmènerons pas les médecins, car c’est sur nos canapés qu’ils viennent dire qu’ils savent comment en finir
Nous ne nous rebellerons pas contre nos patients qui croient au mirage d’une guérison gratuite, offerte par l’état car nous savons que l’être humain préfère éviter de voir la dure réalité. Celle d’une souffrance humaine, chaque jour plus grande, et d'un état impuissant à stopper la marche d’un système qui nous broie et nous détruit autant qu’il détruit la nature et les ressources qui nous entourent
Lorsque j’étais sur les bancs de la fac, et que le prof nous parlait de l’expérience de Milgram, une amie s’est tournée vers moi et m’a dit : « toi, tu n’appuierais pas sur le bouton, n’est-ce pas ? » Non, je ne me soumettrai pas à une autorité qui me dit de prendre la dignité de mes concitoyens. Mais ce qui m’a réellement touchée, c’est la tristesse que j’ai lue dans ses yeux. Le doute. « Je ne suis pas sure »
C’est cette dignité là pour laquelle je me bâterais toujours, celle d’être libre de dire non
C’est elle que porte notre drapeau, le drapeau du BOYCOTT
Écrit par Isabelle Leboeuf ! Merci à notre collègue et consœur, membre du pour cet écrit 🙏