02/12/2025
Du cancer du sein, on entend souvent parler des conséquences médicales ou de la perte de cheveux engendrées par la chimio. Moins des bouleversements qui chamboulent la sexualité, le désir, la séduction. Pourtant, cette réalité affecte tout autant les premières concernées. Elles racontent.
L’image de soi et de son corps, mise à mal par la maladie
Carine a 42 ans. En octobre 2022, elle a été diagnostiquée d’un cancer du temps, en même temps que d’une malformation de l’utérus. « J’ai découvert une grosseur dans mon sein gauche avec une rétractation du téton pendant l’été », nous raconte-t-elle. « J’ai consulté en rentrant de vacances. Le jour de l’annonce, mon monde s’est effondré ».
Les conséquences des traitements et de l’hormonothérapie ont mis à mal sa féminité et son intimité. Entre les bouffées de chaleur, la sécheresse vaginale et puis, à cause du médicament qui bloque les récepteurs d’hormones, la perte de libido, le cancer a « fait beaucoup de dégâts », précise-t-elle. « J’ai eu une tumorectomie, ce qui n’est rien comparé à d’autres. Mais ce sein déformé et avec une cicatrice me dérange. Je ne veux plus que mon conjoint me voit sans t-shirt, ni même qu’il me touche ce sein. Il me répète sans cesse que pour lui je suis toujours là même et qu’il m’aime ainsi mais pour moi c’est très compliqué à gérer », raconte-t-elle.
« L’image du corps peut être altérée »« Cela peut être un trouble du désir, des difficultés à réinvestir certaines parties de son corps, notamment pour le cancer du sein. Pour beaucoup de femmes, cela touche à la féminité. Après une chirurgie, certaines femmes peuvent avoir des difficultés à montrer leur poitrine ou à se laisser toucher par le ou la partenaire.
Réinventer la sexualité pendant un cancer du sein
« Si le sein était investi comme objet de séduction ou d’érotisme, la sexualité peut être atteinte de manière importante. Il faut du temps et de la douceur pour accepter ce corps avec ces nouvelles particularités. D’où l’importance d’être accompagnée par le ou la conjointe, mais aussi par des professionnels », observe Virginie Gasc. Cécilia, 53 ans, reconnaît avoir été terrifiée à l’idée de subir une tumeroctomie. « Je ne savais pas comment j’allais réagir face à cette mutilation. Est-ce que j’allais perdre la sensation du toucher ? Est-ce que le regard de mon époux allait changer ? », témoigne-t-elle. Diagnostiquée d’un cancer du sein lobulaire en janvier 2023, elle confie avoir « prié son chirurgien de préserver son sein le plus possible » .
« C’est une zone très érogène pour moi, donc j’avais peur de ne pas retrouver une sexualité épanouie ». La quinquagénaire témoigne elle aussi des effets secondaires des traitements parmi lesquels des nausées, des maux de tête, une prise de poids, une sécheresse vaginale et une libido en berne. Alors, il a fallu repenser les rapports sexuels. « On a dû chercher d’autres façons de se donner du plaisir. Cela passait par davantage de caresses et de douceur », nous dit-elle.
Pour l’oncosexologue Virginie Gasc, la sexualité est tout à fait possible pendant un cancer, en fonction du vécu et de l’envie de chacun. « La sexualité ne se résume pas à la pénétration. C’est toujours agréable de partager un échange, un moment intime, avec son ou sa partenaire », précise-t-elle. « A certains moments des traitements, il y a des choses que l’on ne pourra pas faire lors des rapports sexuels tels qu’on les vivait auparavant avec son/sa partenaire, donc il va falloir adapter la sexualité et faire preuve de créativité ». Christelle, 36 ans, diagnostiquée d’un cancer du sein hormonodépendant, a subi une ablation en avril 2023. Elle affirme : « La sexualité m’a "réconforté" durant mes chimios et depuis ma mastectomie, je me sens décomplexée, avec une f***e envie de donner et prendre du plaisir sexuellement. J’ose davantage, peut-être parce que je ressens mieux mon corps après ce qu’il a traversé, je suis plus proche de mes émotions, et mon couple est plus soudé que jamais ».