01/11/2022
Merci Les lunettes de Maja - accompagnement parentalité familles et pros pour cet article.
Je le trouve très intéressant .
Bonne lecture 🌸
Quand on est respectueux de l'enfant, on est forcément laxiste.
Je ne vais pas aller dans l'excitation générale en mode offusqué à se défendre des accusations courantes de laxisme visant à détruire toute velléité à changer de paradigme, mais expliquer pourquoi il y a forcément une part de laxisme quand on est dans une démarche d'accompagnement respectueux pour celles et ceux qui n'osent pas encore l'assumer à cause du parent shaming ambiant, et pourquoi cette accusation devrait même complètement glisser sur nous qui œuvrons pour une meilleure considération de l'enfant dans notre société, en tous lieux.
Le laxisme selon le Larousse est un mot qui vient du latin laxus, relâché, et qui désigne "l'attitude de quelqu'un qui est excessivement indulgent, tolérant".
L'éducation traditionnelle a conditionné un regard négatif sur l'enfant qui serait comme un diable sorti de sa boîte (ou une gr***de dégoupillée ?) si l'autorité ferme de l'adulte n'était pas là pour le recadrer et le mettre sur le droit chemin.
Cette éducation est assortie d'injonctions qui poussent à instaurer un cadre stricte constitués de règles pour plier l'enfant aux exigences des adultes.
Qu'il le veuille ou non, l'enfant doit s'y con-former. A défaut il subit la punition de l'adulte (pour certains c'est l'enfermement dans la chambre, d'autres les fessées ou claques etc.)
Mais on ne s'embarrasse pas de savoir si l'enfant peut répondre à ces exigences … et encore moins de connaître les conséquences de ces punitions sur la construction de l'individu vulnérable qui dépend de l'adulte qu’est l’enfant.
Ces exigences sont en fait souvent irréalistes concernant les capacités des enfants, elles ne tiennent pas compte de son état, de son stade de développement, de ses spécificités neurodéveloppementales ( car non les neuroatypies ne sont pas juste des "théories à la mode" 🤦🏻♀️…).
Tu jettes des pâtes à table à 18 mois parce que tu ne sais pas comment dire que t'as plus faim et que tu veux passer à autre chose, mais tu ne sais pas sortir tout seul de ta chaise haute ➡️ t'es puni.
T'as 3 ans et tu te sens surstimulé dans un hypermarché où on t'as amené de force juste avant le dîner, t'as faim et tu es attiré par un paquet de chocolat d'une grande marque industrielle de produits sucrés qui a dépensé des millions en neuromarketing pour t'appâter avec son packaging (même les adultes y succombent) mais comme on te le refuse, tu ne sais pas exprimer ton mal-être arrivé à son apogée autrement que par des cris en te roulant par terre ➡️ t'es puni.
T'as 7 ans et à l'école le maître t'as traité de bébé cadum parce que tu t'es mis à pleurer en classe et, en retour, tu l'as traité de con parce que tu viens d'apprendre ce mot, tu sais qu'il est utilisé par les adultes quand ils sont en colère mais toi-même tu ne sais pas exprimer autrement ta colère face à un adulte qui porte atteinte à ton intégrité ➡️ t'es puni.
T'as 10 ans et tu as un trouble développemental qui empêche ton cerveau d'avoir la maturité émotionnelle "liée à ton âge" et tu te roules encore par terre au magasin pour un kinder comme si t' avais 3 ans ➡️ t'es puni.
Bref t'es puni dès que ton comportement ne répond pas aux attentes, peu importe si tu peux ou pas adopter le comportement attendu et peu importe les raisons de ce qui t'as mis dans ces états.
Dans toutes ces situations l'enfant fait pourtant du mieux qu'il peut avec les moyens qu'il a. Et il a toujours une raison pour agir comme il le fait, même si ce qu'il fait n'est pas toujours acceptable.
Quand on est dans l'accompagnement respectueux des enfants on a une grande indulgence vis à vis des erreurs commises par l'enfant parce qu'on sait qu'il est en développement et qu'il est en plein apprentissage, on essaie de comprendre l'origine du comportement non adapté ou non acceptable socialement et de proposer une alternative pour que l'enfant connaisse d'autres options qu'il finira par appliquer quand il sera en capacité de le faire. Notre indulgence est basée sur notre connaissance du développement de l'enfant qui nous permet d'avoir des attentes réalistes : on sait que sa capacité peut prendre du temps à se construire.
On a aussi une grande tolérance puisque nos règles sont différentes de celles de l'éducation traditionnelle, on a une posture très souple en adaptant ces règles aux capacités de l'enfant. Longtemps il peut même ne pas y avoir de règles au sens où beaucoup l'entendent … puisque pour qu'une règle puisse exister il faut qu'elle soit applicable or pendant les 3 premières années de l'enfant au vue de ses capacités c'est quasiment impossible, et c'est donc à l'adulte d'exécuter les règles …
Alors oui nous sommes laxistes et être laxiste ça ne veut pas dire attentiste ou non interventionniste …
Être dans un accompagnement respectueux ça demande beaucoup plus d'efforts que de "juste punir" l'enfant dès qu'il a un comportement inapproprié : ça mobilise de nombreuses compétences parentales comme l'empathie, l'écoute, la créativité, la patience, la répétition, l'intervention active en faisant avec l'enfant en montrant des exemples, la remise en question de ses propres schémas, l'information etc.
Et parfois on s'en veut de ne pas être en capacité de les mobiliser parce qu'on peut-être tenté, par automatisme ou par perte de moyens, de faire comme on a été conditionné à faire : punir …
Le niveau d'indulgence et de tolérance est lié au niveau de compréhension et de compétences mobilisées pour accompagner l'enfant. Ce niveau est évidemment jugé excessif et constitue donc un laxisme pour toutes celles et ceux qui ont une compréhension et des compétences limitées au mode réactionnel "punition".
Alors oui nous sommes laxistes parce que nos ambitions éducatives dépassent celles qui visent à soumettre l'enfant à l'obéissance et le conditionner à la peur de la punition, nous visons la construction de personnes qui exercent leur esprit critique et leurs compétences sociales, nous visons également la qualité de la relation qui ne peut exister dans un rapport autoritaire.
Pour celles et ceux qui ont cette dernière ambition, la notion même de laxisme induit un rapport d'autorité vertical de dominé/dominant. Donc si nous ne sommes pas dans ce genre de relation avec nos enfants, le laxisme sort même de l'équation 🤷♀️.